Le boson BEH, pierre angulaire du “modèle standard” de notre univers.
Le « modèle standard » est celui qui unifie notre monde apparemment complexe et désordonné. Dans son acceptation actuelle, il prévoit qu’il y a douze particules élémentaires, les briques de l’univers : six « quarks » (un nom tiré par Murray Gell Mann d’un livre de James Joyce et dont l’assemblage donne le proton ou le neutron) et six « leptons » (dont l’électron). La plupart de ces particules n’existent que dans les accélérateurs de particules et n’ont vécu que dans les premiers instants de l’univers, notre monde courant se contentant de quatre particules élémentaires. Le « modèle standard » suggère aussi que les quatre forces (cinq, si on sépare l’électricité et le magnétisme) de l’univers peuvent être unifiées dans une même équation, une superforce. Un concept apparemment surprenant. Car comment imaginer que les éclairs, l’électricité, le magnétisme de l’aimant, la radioactivité, ou les forces nucléaires des réacteurs ou de la bombe atomique ne sont finalement que des formes diverses d’une même force ? Ce modèle introduit des forces agissant à l’échelle subatomique et donne une explication unifiée de l’origine de ces forces. Et, pour expliquer l’origine de la masse des particules, comme le lien entre les forces à longue distance et celles à courte distance, le modèle s’appuie sur le « boson de Brout-Englert-Higgs ».
Cette particule ou ces particules (car il pourrait y avoir une famille de bosons) seraient les agents provoquant les ruptures de symétrie et donnant la masse. Pour en comprendre le mécanisme, on peut prendre une comparaison : on imagine que tout l’univers est rempli par un grand champ, le champ de BEH, que l’on pourrait comparer à un champ de neige (François Englert parle d’une mer). Les particules peuvent y circuler, certaines vite, quasi sans entraves, comme si elles avaient des skis pour surfer sur la neige. Elles ont alors une petite masse, voire une masse nulle et circulent alors à la vitesse de la lumière. D’autres ne peuvent circuler que lentement, s’enfonçant dans la neige, freinée plus fortement par ce champ de Brout-Englert-Higgs. Ce sont les particules lourdes. Seule l’existence d’un tel champ permettrait d’expliquer pourquoi les particules qu’on connaît ont la masse qu’on connaît et expliquer la rupture spontanée de symétrie à l’origine de la différence entre forces électromagnétiques et forces faibles (voir l’interview de François Englert dans « La Libre » du 4/7). Et, en physique, qui dit champ, dit particule associée (comme une « vague sur la mer », dit Englert) : le fameux boson qu’on a trouvé.
Guy Duplat
Publié le dans la Libre Belgique